vendredi 5 juin 2009

Home, sweet home

Je pense que pas mal de gens sont restés scotchés devant leur télé hier soir pour regarder HOME, surtout ceux qui ont une fibre verte qui leur court dans les muscles.

Une certaine hésitation avant de choisir France 2 quand même, tant le hype était fort et le matraquage publicitaire en France bien organisé.

D'abord, évidemment, la magie des images. Magie et image, ce sont d'ailleurs des anagrammes et probablement (?) des étymologies communes. Magie multipliée par l'écran HD, dont les images hyper-piquées creusent l'écran comme si ce n'était qu'une fenêtre ouverte sur un monde à plusieurs dimensions, juste là, dans le salon. C'est tout juste si on n'en attrape pas des vertiges, si l'oreille interne n'est pas trompée elle aussi !

Des images claires, travaillées, montées en succession rapide, où on a choisi la couleur et les compositions de formes et de mouvements avec une force qui vaut tous les délires des films d'Hollywood, où les caméras virtuelles ont remplacé les caméras réelles. Un film aux images coup de point, qui montrent un monde ensoleillé, comme pour prouver que le propos est aussi juste que les images sont claires et belles !

Grands prix de la mise en scène et de l'image accordés à l'unanimité par le jury !

Le propos par contre heurte, me heurte moi au moins, de même que l'argumentaire du discours et l'ouverture du débat.

Pas le moindre doute, c'est un discours fermé, qui proclame une vérité et qui n'appelle pas de débat. Les images ont valeur de preuve, ce qui me gêne. Les images sont choisies, comme c'est le privilège de l'artiste, mais le propos est celui de la leçon, leçon de morale, leçon d'éthique environnementale citoyenne et, comme tel, la preuve par l'image ne suffit pas.

Ouverture, zéro pointé. Pas la moindre chance de dire autre chose, autrement, de nuancer ou même de contester, en partie ou en tout.

Le ton ensuite. La leçon. La leçon de chose ou la leçon de morale, ou la leçon d'instruction civique de mon enfance. C'est vieux cela ! Cela remonte à un monde que je croyais révolu, contre lequel j'avais contruit mon adolescence et mon attitude au monde ? Un peu comme les discours qu'Obama vient de faire en Egypte, en Allemagne, qu'il va faire aujourd'hui à Omaha Beach, un ton qu'on accepte dans la bouche d'un Américain, mais qui ne correspond pas, tel quel, à une sensibilité européenne plus avide de critique, de relativisme, même modéré, de doute !

Le fond.

Que dit Yann Arthus-Bertrand, le Celte vert, qui défend la planète du haut de ses hélicoptères, assez avides de carburants ? Que la planète est finie, que ses ressources seront épuisées dans pas longtemps, que les riches possèdent la terre. Que le réchauffement climatique arrive, est déjà là, et que çà va créer un bordel pas possible.. Que nourrir le monde, tout le monde, va devenir compliqué, surtout si on s'obstine à manger pareil, surtout autant de viande. Problème avec la ressource halieutique. Etc.

Plein de vrai, un peu de faux, des analyses à l'emporte pièce... Dur dur, ces gens qui pensent aider avec un tel coquetel d'approximations ! La pensée floue peut-elle conduire à la lumière de la vérité ?

Le réchauffement, c'est vrai. Les énergies renouvelables, c'est une solution, mais çà ne suffit pas et, poussées à l'extrême (les 20% en 2020), elles vont aussi créer plus de problèmes qu'elles n'en résoudront in fine, peut-être, je ne dois pas moi non plus sombrer dans les généralités simplistes ! Il faut parler de néga-énergie, de nucléaire, 3, 4 et 5G, de CCS, de charbon, de biomasse et d'énergie musculaire des individus.

L'épuisement des ressources, çà dépend, c'est beaucoup plus compliqué que cela !

L'idée que la consommation de viande, conduite au niveau occidental, n'est pas durable, c'est vrai aussi. Mais comment fait-on pour réguler cela ? Ces marchés sont tirés par les consommateurs, qui ont des besoins réels et des besoins plus virtuels liés à des visions du monde, des modes si l'on veut, par des lobbies - ceux des éleveurs, de la viande, du soja, des antibiotiques pour animaux, etc., et par l'économie de marché, distordue par les subventions, les oligopoles et les oligopsones. Prêcher ? Laisser les consommateurs trancher, in fine, quand la vérité leur apparaîtra ?

On peut interpréter le discours en disant qu'il a trop de gens sur cette terre, trop de pauvres, trop de gens qui veulent vivre comme des riches. Où cela mène-t-il ? Eugénisme ? Psychologie sociale à la papa (eugéniste aussi !) ? Reprise en main morale et politique des masses ? Est-ce la fin annoncée de la démocratie ? La croissance est terminée, désolé pour ceux qui ne sont pas montés dans le train ! Je pleure sur vous.

Un discours vert assez altermondialiste, donc, qui ouvre des portes de grange à tous les totalitarismes et à tous les fascismes ! Consciemment ou peut-être pas, la bonne foi s'alliant souvent à la naïveté.

On peut aussi reprendre le discours à l'envers et en garder ce qui y est juste...

En fait ces belles images, si elles avaient été sans parole, aurait été parfaites ! L’esthétisme de YAB sans son discours boy-scout et ses tentations ambigües de politique d'un autre monde, l'autre, l'alter, et le vieux monde et ses démons.

Donc, messieurs les fabricants de télé HD, vendez des modèles sans le son !

Et tous les autres, YAB en tête, acceptez un peu plus de complexité dans le monde et un peu plus de recherche et de difficulté dans la mise à jour de solutions ! Qui seront probablement plus locales, moins globales, moins mondiales...

Car c'est une chose de dire qu'on a atteint la finitude de la planète, c'en est une autre de faire un film à la gloire de la mondialisation, même décalé, autre poncif qui mériterait d'être dépoussiéré après les strates de c... que Alain Minc et les autres ont construit sur ces mots.

Pour être juste, il y avait quelques secondes dans le film consacrées aux micro-crédit.