samedi 6 juillet 2013

Mal à l'aise...

Il y a eu en mai et juin 2013 la législation en France sur le mariage pour tous et ces manifestations de masse de gens parcourant les rues, souvent avec leurs enfants, et expliquant que la famille est en danger et qu'il est inconcevable que l'état décide sur un sujet où leurs idées sont arrêtées et contre ces idées. Il leur était impossible d'accepter que la majorité décide autrement et le leur impose.

Imposer est d'ailleurs un bien grand mot. Cette loi parle d'autres personnes qu'eux - car, apparemment, il n'y avait pas beaucoup d'homo dans ces manifs -, s'applique à d'autres gens, mais néanmoins, ils ressentaient comme inacceptable le texte de cette loi. Un peu comme si cette loi-là devait être votée par référendum à l'unanimité.

Ils oublient aussi, ces gens, que parmi leurs jeunes enfants, 10% se découvriront homo. Ca sera particulièrement difficile à vivre pour ces futurs ados et les familles aussi vont passer par des moments difficiles.

La droite a repris ce "combat" à son compte. Une cohorte de gens autour de l'UMP, où les homos sont aussi nombreux qu'ailleurs. Je connais pourtant des gens de droite qui ne sont pas homophobes !

Mais l'église aussi, l'église officielle a repris ce combat. Des chrétiens nombreux dans les manifs, c'est leur droit.  Mais aussi le soutien de nombreux évêques, des évêques de France, du pape, et même du Saint Siège dans une encyclique signée de deux papes et parue hier.

Là, je ne suis plus. Il ne me semble pas que l'évangile dise quoi que ce soit qui permette de prendre de telles positions. Il me semblait même que la charité disait tout le contraire : c'est l'autre qui est l'essentiel, le prochain, pas ce que je pense, que je pense à sa place, mais ce qu'il pense lui, l'hétéro, l'homo, l'abstinent.

Mal à l'aise, mais de fait plutôt révolté, fâché, écœuré. Le pape François nous a refait le coup de Sarkozy, nous déstabilisant par des paroles décalées, médiatiques, a priori intéressantes et, au pied du mur, poursuivant l’œuvre discutable de ses prédécesseurs. Dont il va en canoniser deux. Comme si cela avait encore un sens de canoniser des contemporains et de proclamer que des miracles ont eu lieu à la fin du XXème siècle.

vendredi 5 juillet 2013

1994

Des que je tape sur ce clavier, une énorme machine se met en marche pour enregistrer ce que j'écris, me l'attribuer et permettre à des gens, qui n'y ont jamais pensé avant, d'en tirer des conclusions. Une machine rapportant à la NSA, mais probablement d'autres machines ailleurs aussi, y compris celle qui travaille pour le compte de notre DGSE franchouillarde. Quel succès, alors que je n'ai que commencé à écrire, beaucoup plus facile qu'un livre et les affres de sa publication !

En plus, ça permet des allusions littéraires, d'autant plus redoutables que 2013 et mon environnement, la cuisine du p'tit déj où j'écris, solitaire, n'ont rien à voir avec Orwell : pas de conscience d'être observé, pas d'emploi d'espion en temps réel dédié à me surveiller, simplement la possibilité que des algorithmes trouvent des choses déplaisantes pour moi ou utiles à quelqu'un dans ce que je confie à mon clavier virtuel.

L'édito du Monde daté d'aujourd'hui dit assez directement que tout le monde a l'air de s'en foutre, enfin, pas si simplement ni en si peu de mots. La démocratie est en danger, de façon profonde et subtile, mais pas vu, pas pris, car les média, finalement, on ne les croit pas. Les protestations de Hollande sont molles parce qu'il a découvert en arrivant au pouvoir que sa République sainte et apostolique fait pareil. Le plus important, aujourd'hui, le seul fait politique, ce sont les vacances en France.

A quoi toute cette surveillance sert-elle ? A combattre le terrorisme, nous dit-on.

Mais comment le savent-ils que c'est vraiment efficace, tous ces gens qui achètent des super calculateurs, des data centers cachés et qui paient des mathématiciens pour faire du data mining intelligent ? On ne nous le dit pas, secret défense oblige.

C'est pour les mêmes raisons qu'on nous pourrit la vie dans les aéroports et qu'on a transformé une expérience qui fut plaisante et magique en un pensum difficile à supporter, les soirs de déplacements lointains où on rentre fatigué vers la maison : sortez votre ordinateur, votre iPad aussi, et vous avez sûrement des câbles qui vont avec, mettez donc aussi votre appareil photo, vous n'avez vraiment de liquide, il faut enlever la montre, le manteau, la veste, ah oui la ceinture, et enlevez vos chaussures ce sera plus sûr.

Combien d'attentats en avion ont été évités ? Mystère. On nous annonce de temps en temps le démantèlement d'une cellule terroriste, effet d'annonce qui me met en appétit, mais il n'y a pas de suite; la plupart des vilains sont libérées dans la discrétion, ou alors il s'agit d'amateurs en bande assez désorganisée qui ont flippé, dérapé, basculé dans du rêve stupide, mais qui ne mettaient vraiment pas l'état ou la communauté internationale en danger.

Faute d'en savoir plus, je fais donc l'hypothèse la plus probable que cela ne sert pratiquement à rien. Si tout cela avait une effet important et mesurable, "on" se serait chargé de le faire largement savoir.

D'ailleurs je passe encore beaucoup plus d'heures dans les TGV et les métros de différentes capitales, où il y a eu jadis des attentats assez atroces, mais où on ne contrôle rien et où il ne se passe pas grand chose, en dehors des vols à la tire ou du picage des poches.

Al Kaida voulait saper les institutions occidentales, et bien c'est parfaitement réussi. 20 sur 20 en efficacité et en subtilité, puisque la fin passe par des chemins imprévus, pas annoncés. Ce ne sont pas les avions qui explosent, mais les files qui s'allongent dans les aéroports, des milliers d'heures perdues chaque jour, les centaines d'emplois inutiles et probablement pas très enrichissants des gens qui me rappèlent que je dois sortir mon iPad. Et les services cachés, secrets, qui amassent comme des écureuils des données personnelles, pillent notre vie privée et sapent la démocratie.

Un sans faute pour Ben Laden, qui se perpétue malgré sa disparition physique... Laquelle d'ailleurs doit beaucoup aux drônes, et à cette guerre étrange où les États Unis s'arrogent le droit de surveiller et de tuer leurs ennemis, enfin ceux qu'ils labèlent de cette façon, libre arbitre effrayant des états surpuissants.

Vais-je finalement envoyer ce blog ? Il contient tous les mots clés pour être remarqué par les machines, avec en prime une conclusion inacceptable, hérétique, séditieuse. Cependant, je crains qu'il ne soit déjà trop tard, car Google me fournit gentiment une fonction de sauvegarde automatique et les mots sont déjà ailleurs, dans un data center de l'Alaska ou du Canada.

Mais il y a d'autres choses à dire. Je sombre ici dans la théorie du complot.

Certes, je ne sous-estime pas l'inertie des machines lancées à grande vitesse, la pensée panurgienne, la règle de prudence, le principe de précaution - la plupart du temps si con. Mais les gens qui font tout cela sont intelligents et ils savent eux que les retombées annoncées au nom de la guerre contre le terrorisme sont si faibles que nulle en est une bonne approximation. Ils savent que le terrorisme existe, mais qu'il survient sans raison chez des déséquilibrés, souvent bardés de la nationalité du pays où ils "s'expriment" et ayant accès à des armes de destruction massive, enfin à l'échelle du terrorisme; dans les écoles en Amérique ou en Allemagne, ou en France ou en Norvège. Des gens qu'on n'a pas vu venir, ou si peu qu'on n'a rien fait avant l'acte. D'ailleurs, un acte terroriste existe-t'il avant l'acte ? Le monde réel n'est pas un roman de Philip Dick !

Donc ces gens intelligents ont d'autres buts, beaucoup plus sérieux. Je penche volontiers pour l'espionnage économique, une autre espèce de paranoïa, qui voudrait faire croire que les entreprises ont des secrets qu'il suffirait de voler. Secrets certes, mais pas de cette nature, c'est plus simple et plus compliqué ! C'est dans l'esprit, la tête des gens... Plus difficile à voler, sauf à débaucher ces gens-là. Merci, il y a des chasseurs de têtes, profession légale et respectée, qui font cela fort bien.