lundi 13 avril 2009

Chasse aux idées, suite....

On a évoqué hier les fauteurs de crises pendus à la lanterne, comme perpective noire de la crise, si les choses continuent d'aller mal.

Comment d'ailleurs penser un seul instant que les choses vont aller mieux rapidement ? Fin 2009, début 2010, comme titre le monde pour la deuxième ou troisième fois ? Sur le foi des analystes financiers, dont le flair et la pertinence n'est plus à démontrer ??? 

L'annonce d'ArcelorMittal de fermer trois nouveaux hauts fourneaux pendant plusieurs mois, sans vision de les rouvrir au-delà de cette période, qui devient de facto reconductible, a déclenché une envolée du cours à la bourse de Paris, laquelle a aussitôt entraîné le CAC40 à la hausse. 

Ambiguïté de cette décision, qui valorise le fait de ne pas voir l'avenir à plus de quelques mois, le constat que la production d'acier en Europe s'est effondré de 50% (je dis "50%" !!!)... Bien sûr que l'entreprise n'a pas trop le choix, elle ne peut empiler des coils d'acier comme les gratte-ciels de ferraille de Wall-e : arrêter les outils de production est la seule façon de ne pas se ruiner. Mais les commentaires de la presse ont commencé à parler de risque de faillite de la plus grande entreprise sidérurgique du monde, comme on le fait depuis longtemps de l'industrie automobile, pourtant beaucoup plus mal gérée mais à laquelle elle est liée de façon structurelle. 

Donc, la bourse continue à fonctionner avec des réflexes automatiques, qui ne correspondent guère à l'analyse, même la moins imaginative, de la crise actuelle et qui ne donne pas sa chance à l'avenir. Replis frileux des traders, des analystes et des modèles sur ce que l'on croyait savoir, qui n'est plus vrai du tout, mais les réflexes fonctionnent encore... Comme un canard dont on vient de couper le cou et qui s'enfuit au bout de la basse-cour ! Une bourse écervelée ?

La lanterne donc, revenons-y. Ou à des substituts légaux d'icelle. 

En allant jouer dans un parc peuplé de balançoires et de toboggans et de gamins des quartiers pas très favorisés de la périphérie de ma ville, je suis frappé par le nombre de gosses en sur-poids, certains carrément obèses ! Ils mangent d'ailleurs des tas de trucs en jouant. 

Si on en croit médecins et diététiciens, cela va conduire à des maladies chroniques apparaissant très tôt et, in fine, à une espérance de vie de cette fraction de la population plus basse qu'aujourd'hui : la fin de la croissance, dans cet univers de la santé aussi ? 

Un jour, les marchands de barres chocolatées, de boissons chargées de sucres, seront appelés à rendre des comptes. Comme les marchands de cigarettes sont peu à peu amenés à payer pour les cancers du poumon dont ils sont la cause. Procès de Mars, des céréaliers, des restaurants de fast-foods... Ce seront les tribunaux, pas les altermondialistes de Roger Mauvais, qui s'en chargeront peut-être un jour. Avis aux analystes financiers... Quaks, à vos modèles !

Autre corporation, qui a des soucis à se faire, celles des publicitaires qui vendent ces rêves de sucres et de diabète associé aux gamins piégés devant leurs écrans de télé, dans les émissions de dessins animés qui peuplent le paysage audiovisuel le matin. Non seulement, leur responsabilité sera engagée, mais une partie de leur business s'évaporera ! 

Encore le marketing dévoyé, sans âme, et ses suppôts, communication et publicité, qui reviennent dans les rangs des mauvaises idées....

A suivre, encore...





dimanche 12 avril 2009

La chasse aux idées qui nous ont plombés...

Il y a le monde d'avant la crise et celui d'après la crise. Comme les anciens et les modernes. Les réactionnaires et les révolutionnaires. 

Le monde d'avant était peuplé d'idées fausses ou d'idées qui n'avaient pas la portée universelle capable de nous porter vers l'avenir durablement. Des fausses bonnes idées, comme il y en a tant. Mais des idées à la mode, populaires - en franglais, qu'on nous a vendues comme des évidences, à grand coup de suffisance, d'arrogance, d'hubris, et à grand renfort de techniques de bizutage, de non-dit et de çà-va-de-soi. Ces idées qui ont gonflé des bulles qui ont porté des nouveaux riches, qui ont tiré un temps la croissance mondiale, mais qui nous laissent sur la grève, maintenant que les bulles ont explosé et que le flux s'est retiré. Laissant certains sans autre recours que la grêve...

Partir en chasse à ces idées fausses est salutaire. 

Cela évite les chasses aux sorcières et aux boucs émissaires, comme celles qui sont conduites par certains démagogues et certains hyperdirigeants,  qui font du bien, celui d'être unis dans le malheur, les grands et les petits, les forts et les faibles, tous ramenés à la norme minimale et à la grisaille commune, mais qui n'aident guerre à imaginer autre chose, de nouvelles idées, des idées porteuses d'avenir, des idées à repousser le malheur. Et qui conduisent à des séquestration de dirigeants, pour commencer, et, peut-être bientôt, à la lanterne, carrément, ou débités en morceaux et décorant les piques et les grilles des lieux publics !

Cela nous inscrit dans une tradition culturelle, Flaubert, Brel et, tant qu'on n'y est, la Genèse, qui décidément a parlé de tout, pas seulement de la création du monde...!

Cela évite aussi la dérive actuelle de chacun d'entre nous, la presse comme les bloggeurs, ceux qu'on lit et ceux qu'on ne lit pas, pas encore, qui y vont de leur théorie systémique, celle qui explique les défaillances ayant engendré la crise par des explications sur les processus qui nous guident, comme si le monde était une entreprise adhérent aux normes ISO 9000, 14000 et les autres.  La crise financière, la crise de l'économie réelle, la crise des liquidités, la trappe aux liquidités, les subprimes, les fonds pourris, les outils dérivés, leur opacité - la théorie que je trouve la plus drôle, la plus incroyable, la plus sombre et la plus pessimiste sur l'homme ! -, le système de normes comptables internationales, la crise sociale, la crise politique,déjà là ou à venir, etc... 

Sauf une, bien sûr, la mienne, qui met en avant la bulle de consommation portée par un marketing dévoyé, vendant au consommateur qu'on hypnotise et qu'on soigne à coups de crédits faciles des produits sans finalités, sans contenus, sans qualité, dont il n'a pas vraiment besoin, ni même envie sans un peu de viagra publicitaire pour stimuler ses appétits... qu'on achète parce que les autres aussi les achètent, nous dit-on, et parce qu'on le peut, comptant ou à crédit. Laquelle bulle a éclaté, dans un effondrement digne de celui d'un trou noir, qui ferme les usines de voitures, les aciéries et les hauts fourneaux, pour suivre une chute de 50% de la production... 

J'ai déjà parlé des produits médiocres, comme tout ce que vend microsoft - je suis en train de me battre avec un word 2008 pour Mac, si lent que j'en oublierais ce que je veux dire !, comme les balckberry qui parlent français sans accents, comme les restaurants Buffalo Grill qui défigurent les paysages suburbains et présentent sur nos assiettes un pastiche de mal-bouffe qu'ils disent américaine (O Obama, déclare la guerre aux Buffalo Grills avant d'aller en Afghanistan, c'est peut-être plus important pour ton pays !), sans goût, même les frites sont ratées, il faut le faire - et cela en dit long sur la possibilité de faire avaler aux clients de la bouffe pour chat et de les faire payer encore trop cher à la sortie !!!

Donc revenons aux mauvaises idées, celles qui ont conduit à faire pousser ces bulles et conduit à ce débordement de mousse qui nous entraîne vers les cuviers d'Augias puis a explosé...

Au hasard, sans ordre, pas de théorie ni de classement systémique encore, observons, la méthode expérimentale n'est pas encore dans la liste des ces idées toxiques.

La fascination de la minceur que vendent les magazines féminins et aussi masculins maintenant, ceux qui parlent, démagogiquement, au côté féminin de l'homme. Ce goût pour les filles anorexiques, ces waifs qui peuvent s'habiller en 36 et qui fascinent les "grands" couturiers, qui tiennent debout par la force de maquillages de belle au bois dormant plus que par la force de leurs muscles atrophiés, sortes d'enfants sexués faisant appel au côté pédophile de qui d'ailleurs ? Les belles femmes relèvent d'une autre alchimie, celle de la jeunesse, du tonus, de l'insouciance, des phéromones qu'on capte au passage et qui n'imbibent pas encore les pages glacées - au sens propre et figuré - des journaux et des mensuels.  Sans phéromones, des peintres doués les ont d'ailleurs saisies sur la toile, Rubens ou Véronese ou Ingres ou Picasso... 

Derrière ce mythe, qu'on travaillé les psychanalystes de la mode, se cache une collusion de vendeurs de rêve, des rêves basiques et reptiliens, et des marchands, avec tout un monde interlope de communicants et de journalistes qui servent la soupe et lient la sauce. On est loin de la presse, cinquième pouvoir ! 

Cà se résume assez bien par le mot de marketing !

Il y a aussi des mots attrape-tout, comme celui de créatifs. 

Ceux qui se donnent ce nom, les créatifs de la publicité et de la com' par exemple. Qui oublient qu'ils sont à la création, celle des artistes des arts plastiques, ce que la "science" du management est à l'économie ou l'astrologie à l'astronomie... Ce sont des outils, des moyens, des véhicules, des serviteurs.

Ou comme ce banquier, qui refuse un crédit à une styliste talentueuse que j'aime bien, sous prétexte que son activité n'est pas créative.  Curieux exercice de renversement du sens des mots, qu'on chausse comme une chaussette à l'envers, sans probablement s'en apercevoir... La créativité, est, j'imagine selon lui, les nouvelles technologies, nouvelles depuis si longtemps, explosées dans tant de bulles passées et à venir, devoiement des mots pour appeler la soupe, les financements, les crédits, l'image d'une modernité d'avant... 

Autre idée fausse, celle du ROI, le retour sur investissement qu'on a imposé dans les entreprises à 15% ou plus depuis 10 ou 15 ans.  Comme si l'économie croissait à 15%... Ou l'avait jamais fait, même dans le "miracle " de la Chine ! A moins, que consciemment, on ait compris que ces 15% étaient prélevés dans la poche des salariés d'une part et des générations futures  d'autre part ; sans parler du tiers-monde, qu'on vole sans vergogne, sans en avoir conscience (??) et sans en parler ! Un vol à la tire spatio-temporel !  Une version à l'envers du développement durable,  de ce mot attribué à Saint Exupéry, la planète n'est pas un héritage que l'on reçoit de ses ancêtres, mais qu'on empreinte à ses enfants !

Ces mythes de managers, enfouis dans des discours technocratiques sur la création de valeur, le temps de retour sur investissement... Le dernier en date parle de variabilisation des coûts fixes... rappelez-vous la titrisation des risques... On pourrait presque repérer les idées fausses à la voix qu'elles empreinte, aux combinaisons de mots qu'elles associent !

Tout commentaire est le bienvenu, pour compléter cette liste dont ceci n'est que le commencement...!

A suivre, si le temps ne me manque pas.

samedi 11 avril 2009

Rupture de miroirs et marche forcée vers le Léthé

Journées difficiles pendant lesquelles j'ai encore effacé une partie de ce qui restait de mes parents dans notre monde physique. 

Une équipe de déménageurs est venu vider, démonter et emballer le contenu de leur appartement d'Evry. Le cadre dans lequel ils fonctionnaient, le décors de leur vie quotidienne a disparu en quelques heures, dans des cartons, des feuilles de plastique à bulles et des noeuds de ficelle grâce aux gestes rapides, précis et répétitifs du déménageur chargé de préparer l'expédition. 

Le soir même tout se résumait à des empilements de cartons bruns ceinturés de bande adhésive de même couleur et à des meubles emmitouflés dans les feuilles à bulle. Répartis dans un curieux capharnaüm, qui mettait à nu les murs des pièces qu'on n'avait plus vus depuis au moins trente ans. 

Seule vie dans ce passé en cours d'effacement, Naomi, assise à même le parquet, entourée des jouets qu'elle avait apportés avec elle et qui continuait à façonner son présent en jouant, comme d'habitude. Inconsciente du contexte inhabituel et bizarre, et évitant aux autres de se perdre dans la contemplation morbide de cette fin d'un monde.


Une nuit dans les lits pas encore démontés, puis une équipe de solides Déménageurs bretons, noire, blanche, beurre, LOL!, s'est emparé de ces objets en nombre fini qui résumaient la vie de mes parents, et les a descendus dans l'escalier en colimaçon pour en remplir, en deux heures, un camion.  Deux heures simplement, et, à la sortie, un demi-camion de colis compacts, calés et encordés pour effectuer le voyage vers la Creuse. 

Encore plus vite, encore plus dense, encore plus compact. Une vie en 20 m3 !

Victoire de l'entropie, triomphe du désordre, la complexité d'une vie s'enfonce dans le passé et ne subsiste plus que comme des traces dans nos souvenirs ou des images sur le disque terabit.  

Un espace de vie, une écologie familiale se transforme en boites empilées  comme le jeu de lego des enfants qu'on démonte le soir pour que ses briques rentrent dans leur boite. Ils vont rejoindre l'ADN, qui est en train de disparaître complètement dans les cercueils d'Anzême, peu à peu, sauf la version subtilement différente qui subsiste dans mes veines et celles de mes enfants et de leurs enfants. 

Vie éphémère, qui tient tête si longtemps au chaos, en se maintenant grâce à l'énergie qu'elle vole à l'univers, le temps de créer des réseaux, une famille, des lieux de vie, mais qui retourne au chaos quand le temps appelle, tel le démon de Faust ou la statue du commandeur de Don Juan.  

Rendant à l'univers les atomes qu'ils vous a prêtés et donnant à d'autres le droit de piller l'énergie de la nature pour que la vie se perpétue. 

Ce miracle de la vie comme un vaisseau au long cours qui coule sur le fleuve du temps et échappe au vieillissement de l'univers grâce à ces étincelles de vie qui se succèdent si vite au gouvernail et aux machines !

Le miroir que mes bretons brisent en le démontant, parce que la mémoire technique de la façon dont il était fixé leur a échappé, symbolise un retour au chaos encore plus rapide. Des fragments de matériaux et non plus un miroir complexe qu'il est encore possible de reconstruire ailleurs, identique à lui-même. Son intégrité, son essence même, effacées par un geste brusque et non contrôlé. L'ignorance, la non-information au service du chaos, par les gestes de ces déménageurs de l'entropie ! 

La passage consommé vers le futur, sans retour possible vers le passé, rupture d'un miroir semblable aux ruptures de symétrie qui on ponctué la vie du cosmos et instauré l'irréversibilité de la flèche du temps.

Déménageurs bretons, je vous donne ce nom de déménageurs de l'entropie, que votre métier mérite, même si les hommes qui le perpétuent ne brisent aucun miroir. Vous êtes les Charons du Styx, qui emmenez les gens vers l'aval de leur vie et les générations vers leur propre vie consubstantielle à mais séparée de celle des ancêtres.  Vous les passeurs vers l'oubli du Léthé. 

Le lendemain, tout se retrouve à Anzême. Dernier carré où subsiste encore pour quelques temps la mémoire matérielle de mes parents. Les caisses et les meubles empilés, un autre verre brisé, résultat, toujours, de l'ignorance qui travaille au retour de l'informe. 

Et nous fermons la maison, en y arrêtant toute vie, d'eau et d'électricité, pour repartir dans nos vies normales, abandonnant une nouvelle fois mes parents dans leur univers qui se contracte et disparaîtra peu à peu, mais qui le fera définitivement, quand moi et les miens disparaîtrons à notre tour.